Ouvrir un compte-titres ordinaire : la fausse bonne idée

Le compte-titres ordinaire souffre d'une fiscalité bien trop lourde

Certains me demandent si cela vaut le coup d'ouvrir un compte-titres ordinaires en plus du PEA pour pouvoir acheter des actions étrangères, des obligations, de l'immobilier et des produits dérivés. En effet, le PEA est très limité et nombreux sont les investisseurs tentés par les actifs spéculatifs à fort effet de levier et ne pas se limiter aux actions européennes ou ETF.

Cependant, d'après moi, il est totalement inutile d'ouvrir un compte-titres ordinaires pour un investisseur particulier à cause de la fiscalité qui va réduire considérablement la performance de vos placements. Quant aux produits dérivés avec effet de levier, c'est une prise de risques trop importantes pour le gain espéré sur le long terme.

Quelles sont les principales différences entre le compte-titres ordinaires et le PEA pour investir en bourse ?

Un compte-titres ordinaires (parfois appelé CTO) est un support d'investissement que peut ouvrir toute personne physique (même mineure) pour acheter et vendre des valeurs mobilières comme des actions, des obligations, des parts dans des fonds, des produits dérivés, etc. Au travers d'un CTO, vous pouvez même utiliser le SRD (Service de Règlement Différé) pour prendre position (acheteuse ou vendeuse) en ne règlant qu'une partie du montant.

Un Plan Epargne en Actions (PEA) ressemble au compte-titres mais avec des contraintes supplémentaires et des avantages fiscaux pour compenser. Le PEA favorise l'investissement long terme et non spéculatif, dans des entreprises européennes (même s'il est possible d'investir dans le monde entier à travers des fonds ou des ETF).

Un accès à des produits variés... et spéculatifs

Le principal avantage du compte-titres est qu'il offre un très large choix de produits financiers sur lesquels investir. Vous pourrez y acheter des actions étrangères en direct (peu importe la devise), des produits dérivés complexes (comme les turbos, les warrants, les certificats ou les options), des parts dans des fonds très exotiques, des trackers ou ETF, etc. Le SRD vous permet aussi d'avoir un effet de levier important sur les actions. Pour un particulier, le choix est très largement suffisant et bien supérieur au PEA où l'investisseur est restreint aux actions européennes et aux fonds éligibles.

Néanmoins, je vous déconseille vivement d'investir dans les produits dérivés : ils sont très spéculatifs et complexes à appréhender. Pour un particulier, cela revient à jouer au casino avec son argent, sans limite et avec le risque de tout perdre. Certes, un produit dérivé peut multiplier votre mise par 2, 3, 4, voire bien plus en quelques jours, mais vous pouvez aussi tout perdre dans le même temps. La finance est un univers ultra-concurrentiel, et penser se faire de l'argent facilement en tradant depuis chez soi, c'est croire qu'on est mieux informés et qu'on peut battre les milliers d'experts financiers, algorithmes et professionnels dotés des meilleurs outils du monde. Vous y croyez vraiment ?

Enfin, il faut faire très attention aux frais de courtage qui peuvent différer en fonction des actifs achetés dans un compte-titres ordinaire. Certaines banques peuvent vous facturer un coût très élevé quand vous achetez ou vendez des actions américaines par exemple.

Une fiscalité bien trop contraignante

La fiscalité est la raison suffisante qui doit vous empêcher d'ouvrir un compte-titres ordinaire. En effet, au sein d'un compte-titres ordinaires, les plus-values sont imposées au taux forfaitaire unique de 30 % (incluant les prélèvements sociaux). C'est considérable comparé au PEA où les plus-values ne sont imposées qu'à hauteur de 17,2 % (c'est-à-dire uniquement les prélèvements sociaux). Je ne crois pas que les possibilités d'investissement du CTO suffisent à générer une plus-value supérieure de 13,8 % au PEA...

Pour un compte-titres ordinaire, il est aussi possible de choisir le barême de l'impôt sur les revenus au lieu du taux forfaire unique (parfois appelé PFU pour Prélèvement Forfaitaire Unique) : dans ce cas, vous serez imposés à hauteur des prélèvements sociaux (17,2 %) et de votre taux marginal d'imposition (0 % ou 14 % ou 30 % ou 41 % ou 45 %). Cela n'est donc intéressant que si vous ne payez pas d'impôt sur les revenus : j'imagine que cela ne doit pas être souvent le cas des personnes qui peuvent investir dans la bourse...

La fiscalité est rédhibitoire pour le compte-titres ordinaire

Il existe aussi des abattements et des déductions possibles qui permettent de réduire un peu la fiscalité. Mais cela nécessite des calculs fastidieux et une déclaration annuelle complexe dans votre imposition sur les revenus. Les abattements dépendent de la durée de rétention mais ne sont applicables que pour les titres acquis avant le 1er janvier 2018, et si vous n'optez pas pour le taux forfaitaire unique. Quant aux déductions possibles, vous pouvez prendre en compte les frais de garde et de courtage mais, de même, uniquement si vous n'optez pas pour le taux forfaitaire unique.

Conclusion

Malgré le fait qu'il offre un très large choix d'investissement, le compte-titres ordinaire n'est pas un support d'investissement intéressant à cause de sa fiscalité trop lourde, qui va réduire considérablement vos plus-values. Selon moi, un PEA est largement suffisant pour espérer un très bon rendement sur le long terme. Les produits exotiques et spéculatifs sont extrêmement risqués, et vous ne gagnerez pas sur le long terme (à moins d'être meilleur que tous les traders professionnels ou d'être incroyablement chanceux).

Le seul cas où le compte-titres ordinaire n'est pas pénalisé par sa fiscalité, c'est lorsque vous ne payez pas d'impôts sur les revenus (taux marginal d'imposition à 0 %), mais c'est très improbable sauf si vous avez une situation financière très particulière.

Une méthode très facile et efficace pour investir en bourse dans un PEA

Investir en bourse dans un PEA est bien plus facile qu'il n'y parait

Saviez-vous que vous pouvez investir en bourse et faire mieux que 95 % des gérants de fonds, sans effort ni connaissance particulière ? Ce n'est pas moi qui l'affirme mais de nombreuses études empiriques sur les performances de gérants de fonds. En effet, les fonds gérés ont des frais de gestion parfois élevés qui ne justifient pas la surperformance (souvent très faible) par rapport au marché. Il faut aussi savoir que plus les marchés sont efficients, et plus il est difficile de les surperformer : les actions à fort potentiel sont toujours à des prix élevés, et les actions des entreprises en difficulté sont toujours à des prix faibles. Pour simplifier, un marché est dit efficient quand les actifs sont toujours valorisés à leur juste valeur, et il n'y a donc pas de bonnes affaires. Je vous invite à lire ce très bon billet expliquant ce phénomène.

Si vous souhaitez vous lancer dans l'investissement en bourse très rapidement et simplement, sans passer par un intermédiaire, sans vous prendre la tête tout en ayant de bonnes performances sur le long terme, voici la méthode à suivre. La lecture de cet article vous sera largement suffisante pour investir en bourse et avoir d'aussi bonnes performances que les meilleurs gérants de fonds !

Etape 1 : ouvrir un PEA dans une banque ou un courtier en ligne


Choisir sa banque ou son courtier

Le choix de la banque ou du courtier pour héberger votre PEA est la première étape, et la plus cruciale, pour investir son argent en bourse. Je vous invite à lire mon billet qui compare de manière détaillée les différentes banques en ligne qui proposent des PEA intéressants.

Le critère déterminant est, bien entendu, les frais associés au PEA. Contrairement aux assurances-vie, tous les PEA vous permettent d'acheter les mêmes actions d'entreprise et les mêmes trackers ETF. Donc la différence se fait uniquement au niveau des tarifs, et plus particulièrement au niveau des frais de passage d'ordre de bourse (pour acheter et vendre des actions ou trackers).

Personnellement, j'utilise Fortuneo pour mon PEA et cela me convient parfaitement. La tarification fait partie des meilleures du marché, et l'avantage est que Fortuneo propose tous les services d'une banque traditionnelle ainsi qu'une excellente assurance-vie. Si vous souhaitez aussi prendre Fortuneo, n'hésitez pas à utiliser mon code parrain 12644522 pour toucher 150 euros gratuitement à l'ouverture de votre compte (au lieu des 110 euros habituels sans parrainage).

Faire le dossier d'inscription et envoyer les documents justificatifs

L'étape la plus fastidieuse est l'inscription ainsi que l'envoi des justificatifs pour ouvrir votre PEA. Heureusement, vous n'aurez à le faire qu'une seule fois au moment de l'ouverture de votre compte. De plus, avec les banques en ligne, tout le dossier d'inscription se fait en ligne via une interface simple et ergonomique.

Pour ouvrir un PEA, il faut prévoir généralement les documents suivants :
  • Pièce d'identité en cours de validité
  • Justificatif de domicile de moins de 3 mois
  • Relevé d'identité bancaire d'une autre banque
En fonction des banques, il faut parfois aussi fournir un justificatif de ses revenus (fiches de paie par exemple) en fonction des critères d'acceptation de la banque.

Certaines banques vous permettent d'envoyer ces justificatifs de manière dématérialisée (avec des documents scannés) et même de faire la signature électronique avec double authentification au travers d'un code reçu par SMS. Cette méthode semble plutôt efficace et sécurisée. Mais toutes les banques n'ont pas ce fonctionnement moderne et vous serez peut-être obligé de faire un envoi par courrier postal.

Autre information pratique : un PEA est généralement constitué de deux comptes. Il y a un compte-titres utilisé pour acheter et vendre vos titres financiers (actions, trackers, etc.) et un compte-espèces utilisé pour accueillir vos liquidités. Mais pour vous, dans l'utilisation de votre PEA, cela est totalement transparent. C'est juste un peu déstabilisant la première fois, certains épargnants ne comprenant pas pourquoi deux comptes sont affichés quand ils consultent leur PEA.

Etape 2 : verser des liquidités pour acheter régulièrement des trackers MSCI World


Verser de l'argent pour alimenter son PEA

Une fois votre PEA ouvert, il faut y verser de l'argent pour pouvoir ensuite acheter des titres financiers. Cette opération est aussi simple que de faire un virement bancaire sur le compte d'un particulier : vous aurez avec votre PEA un numéro IBAN ou RIB à utiliser pour verser des liquidités. Il vous suffit alors de l'utiliser normalement pour apporter vos premiers fonds à votre PEA. Si vous ne trouvez pas le RIB ou IBAN de votre PEA, normalement, dans l'interface web pour accéder à votre PEA, il doit y avoir une fonction pour éditer un RIB ou IBAN, tout comme un compte courant classique.

Acheter des trackers MSCI World en faisant des ordres de bourse

Tant que vous n'avez pas passer d'ordre de bourse, votre argent dormira dans votre PEA en tant que liquidités, sans aucun risque de moins-value, ni de plus-value.

Désormais, vous arrivez à la question cruciale de tout investisseur en bourse : quoi acheter dans son PEA ? Beaucoup trop de particuliers pensent pouvoir battre le marché et croient pouvoir faire mieux que les meilleurs gérants de fonds et algorithmes d'investissement. Pourtant, les études empiriques le prouvent : sur le long terme, il est plus efficace de suivre le marché avec un panier d'actions le plus diversifié possible.

Selon moi, vous n'avez aucun intérêt à passer énormément de temps à analyser les entreprises pour savoir quoi acheter dans votre PEA. La meilleure façon d'investir pour un particulier reste, et je suis loin d'être le seul à le penser, l'investissement passif qui consiste à acheter régulièrement des trackers MSCI World, car il s'agit de l'indice boursier le plus diversifié, qui suit la performance boursière des 1 600 plus grandes entreprises du monde.

Liste des codes ISIN pour trouver les trackers MSCI World

Pour acheter des trackers MSCI World, il vous faut connaitre les codes ISIN de ces produits. Vous pouvez aussi utiliser les fonctions de recherche de l'interface web de votre PEA mais il existe tellement de produits différents, avec des noms ambigus, et pas toujours éligibles au PEA. Le plus simple est d'utiliser le code ISIN.

En effet, ces codes ISIN sont uniques dans le monde pour identifier à coup sûr un produit financier. Il existe principalement deux trackers MSCI World éligibles au PEA, dont les codes ISIN sont les suivants.
  • AMUNDI ETF MSCI WORLD UCITS ETF EURO (CW8) : code ISIN = LU1681043599
  • LYXOR UCITS ETF PEA MSCI WORLD C-EUR (EWLD) : code ISIN = FR0011869353
Lyxor et Amundi sont deux grandes sociétés financières qui proposent une très large gamme de produits financiers. Même en cas de faillite de Lyxor ou Amundi, vos trackers ne risquent rien car ils représentent bel et bien des parts dans des entreprises dont vous êtes propriétaire, et absolument pas des parts dans Lyxor ou Amundi.

Toujours investir son argent progressivement

La clé du succès dans l'investissement, c'est d'être régulier dans ses achats. Les marchés étant volatils et capricieux, personne n'est capable de déterminer avec certitude les points bas pour acheter. Le mieux est donc d'acheter régulièrement en investissant la même somme à chaque fois : quand les prix seront bas, vous achèterez plus de trackers, et quand les prix seront hauts, vous en achèterez moins. Ainsi, vous moyennerez à chaque fois votre prix unitaire de revient. De plus, investir régulièrement vous force aussi à faire un effort d'épargne.

Comment acheter simplement des trackers ou des actions dans votre PEA ?

Acheter des produits financiers dans un PEA n'est pas si compliqué que ça finalement. Il vous suffit de suivre les étapes suivantes :
  • Connectez-vous sur votre PEA via l'interface web de votre banque
  • Cherchez votre produit financier (action, tracker ou autre) en tapant son code ISIN dans la barre de recherche. Si vous ne connaissez pas le code ISIN, généralement, Google le trouvera pour vous.
  • Cliquez sur Acheter puis précisez la quantité que vous souhaitez acheter
  • Choisissez le type d'ordre de bourse :
    • Au marché signifie que vous achèterez au premier prix le plus offrant, sans aucune limite. Cela n'est pas risqué quand le produit financier acheté est relativement liquide (c'est-à-dire qu'il y a beaucoup de vendeurs et d'acheteurs). C'est le cas des trackers MSCI World éligibles au PEA car la liquidité est assurée par l'émetteur de l'ETF.
    • Cours limité signifie que vous indiquez un prix d'achat unitaire limite à ne pas dépasser, et votre ordre sera exécuté quand il y aura un ordre de vente qui est compatible de votre prix unitaire limite.
    • Meilleure limite signifie que l'ordre de bourse sera à cours limité, et ce cours limité sera determiné suivant la meilleure offre en cours. Par exemple, si vous faites une offre d'achat à la meilleure limite, et que le premier vendeur vend à 100 € (et donc tous les autres vendeurs vendent au-dessus de ce prix), votre ordre de bourse sera créé avec une limite de cours d'achat à 100 €.
    • Les autres types d'ordre sont un peu plus complexes, j'en reparlerai dans un autre article. Ils sont néanmoins peu utiles pour un investisseur long terme.
Voici quelques captures d'écran de l'interface Fortuneo. Comme vous pouvez le constater, c'est plutôt intuitif et simple pour acheter et vendre des actions ou des ETF dans son portefeuille. La première image représente votre PEA et sa composition. Le deuxième écran apparait quand vous cliquer sur le Plus pour acheter de nouvelles actions.

Aperçu de votre portefeuille PEA dans l'interface Fortuneo
Aperçu de l'écran d'achat après avoir cliqué sur le bouton +

La première fois que vous achèterez une action, vous trouverez peut-être ça un peu surprenant voire déroutant. Puis, vous vous rendrez rapidement compte que c'est très simple de trader des produits financiers sur Internet !

Etape 3 : si besoin, vendez progressivement vos trackers pour retirer votre argent

L'argent investi dans un PEA n'a pas pour vocation à y rester éternellement, même si plus vous investissez longtemps et plus avez de chance de faire d'importantes plus-values. Si vous souhaitez profiter de vos investissements, vous pouvez demander le retrait de tout ou partie de votre argent dans un PEA. Mais pour cela, vous devez suivre ces étapes simples :
  • Assurez-vous que votre PEA a au moins 5 ans d'ancienneté : en-dessous, vos plus-values seront taxées à hauteur de 30 % (dont 17,2 % de prélèvements sociaux). Au-delà de 5 ans, les plus-values ne sont soumises qu'aux prélèvements sociaux, soit 17,2 %.
  • Votre PEA doit avoir le niveau suffisant de liquidités (appelées aussi espèces) que vous souhaitez retirer.
  • Pour augmenter les liquidités ou espèces dans votre PEA, vous devrez certainement vendre des actions ou ETF.
    • Pour cela, il suffit de procédère comme une ordre de bourse d'achat mais cette fois-ci, il faut sélection le type d'ordre de vente.
  • Envoyer un courrier (postal ou via Internet en fonction des banques en ligne : n'hésitez pas à contacter le service client pour en savoir plus)  pour demander le retrait de votre argent.
    • N'oubliez pas de préciser l'IBAN ou le RIB pour recevoir l'argent.
Dans un prochain billet, je vous fournirai des lettres-types à utiliser pour fermer son PEA ou retirer une partie de son argent.

Etape 4 : surveiller votre PEA de temps en temps

Quand vous investissez votre argent sur le long terme de manière passive, il n'est pas nécessaire de regarder l'évolution de son PEA tous les mois, encore moins tous les jours. Néanmoins par prudence, je vous invite à vous connecter à votre compte régulièrement, au moins une fois par trimestre pour surveiller l'historique des opérations.

En effet, vous n'êtes pas à l'abri d'un piratage même si c'est de plus en plus rare. Vous pouvez aussi consulter les versements de dividendes issus de vos actions ou vos trackers. Ces dividendes versés en numéraire peuvent donc être réinvestis, et c'est même fortement conseillé pour générer encore de nouvelles plus-values et dividendes. Enfin, vous pouvez être amené(e) à faire quelques arbitrages (c'est-à-dire des achats et des ventes pour modifier votre portefeuille) en fonction des événements majeurs impactant vos actifs : OPA sur une entreprise, perte d'éligibilité au PEA ou PEA-PME, faillite, etc.

Pour suivre l'actualité financière, vous pouvez utiliser les applications mobiles comme celles de Boursier.com ou MSN Finance qui sont de très bonnes qualités. N'hésitez pas à aller de temps en temps sur les sites comme Investir ou ABC Bourse. Enfin, vous pouvez aussi suivre mon compte Twitter @InvestirArgent : je vous tiendrai informé des principales informations impactant le PEA et le PEA-PME, ainsi que les événements majeurs autour du marché actions.

Conclusion

En suivant toutes ces étapes simples, vous arriverez à faire fructifier votre argent sans difficulté dans votre PEA, en y consacrant que quelques minutes par mois (et pas plus de deux heures par an). Cela en vaut vraiment la peine, plutôt que de laisser dormir son argent dans des livrets à faibles rendements. Il ne s'agit absolument pas d'une méthode miracle qui vous garantit de faire d'énormes plus-values, mais c'est la meilleure méthode et la plus simple pour investir en bourse sur le long terme. Comme quoi, la bourse est vraiment accessible à tous et nul besoin de passer par un intermédiaire pour gérer son argent.

Investir dans la Française des Jeux : la fausse bonne idée ?

Ne tombez pas dans l'euphorie boursière autour de la Française des Jeux

Vous en avez déjà entendu parlé dans les médias et la presse : l'Etat va lancer le processus de privatisation de la Française des Jeux, et les particuliers pourront aussi acheter des actions FDJ durant la période de souscription entre le 7 et le 20 novembre 2019. Si le prix de l'action et donc la capitalisation totale de la Française des Jeux ne sont pas encore connus aujourd'hui, on sait déjà qu'il y aura quelques avantages à souscrire pour un particulier durant la phase d'introduction en bourse : décote sur le prix d'achat de 2 % et une action gratuite toutes les dix achetées si ces actions sont conservées au moins 18 mois.

Le modèle économique de la Française des Jeux peut laisser rêveur de nombreux investisseurs particuliers : mathématiquement gagnant sur le long terme, très génératrice de cash, peu risqué et une clientèle qui n'est pas prête de disparaitre... Pourtant, je reste convaincu aujourd'hui qu'investir dans la Française des Jeux est une fausse bonne idée, et je vais vous expliquer pourquoi.

Etre craintif quand les autres sont avides...

La phrase célèbre de Warren Buffet résume très bien la situation : pour réussir en bourse, il faut être craintif quand les autres sont avides, et être avide quand les autres sont craintifs... En effet, vous ne ferez jamais de bonnes affaires si vous achetez quand tout le monde est euphorique et souhaite acheter les mêmes actions que vous car vous les paierez bien trop chères. Au contraire, en période de déprime ou de méfiance, c'est là que vous pouvez acheter à bons prix des actions d'entreprises de qualité.

C'est exactement ce qu'il se passe aujourd'hui autour de cette introduction en bourse de la Française des Jeux : la communication se fait en grande pompe et fortement médiatisée, tout est fait pour inciter les particuliers à y prendre part. Même le gouvernement y va à coup de phrases marketing : faire de la Française des Jeux l'entreprise de tous les Français comme le vend si bien Bruno Le Maire, ministre de l'Economie.

Rien de tel pour me rendre extrêmement méfiant... N'oubliez pas que dans chaque transaction financière, il y a un vendeur et un acheteur. Ici, l'Etat n'a clairement aucun intérêt à brader le prix des actions, et au contraire, va faire le maximum pour tirer un maximum d'argent de cette introduction en bourse. Surtout que depuis la privatisation des sociétés d'exploitation des autoroutes, le gouvernement ne souhaite absolument pas refaire la même erreur en cédant à un prix trop bas.

De plus, face à l'engouement des Français pour cette entreprise, il est clair que le prix d'introduction sera très élevé pour faire face à la demande. Je me méfie d'autant plus de cet engouement populaire car il est principalement véhiculé par une vision biaisée de la Française des Jeux au travers des médias et des préjugés que l'on peut avoir sur le soi-disant monopole des jeux d'argent et de hasard....

Une rentabilité pas si exceptionnelle

Avec un chiffre d'affaires de 15 milliards et 181 millions de bénéfices nets en 2017, la Française des Jeux affichent une rentabilité net plutôt faible de l'ordre 1,2 %, contrairement aux nombreuses idées reçues que la plupart des personnes ont sur cette entreprise. En effet, monopole d'Etat et jeux d'argent ne riment toujours pas avec efficacité opérationnelle et rentabilité exemplaire...

A titre de comparaison, le géant du luxe LVMH affiche 12 % de rentabilité net. Quant au leader des tickets restaurant Edenred, il frôle les 20 % de rentabilité net et génère un niveau très élevé de free cash flow lié à son modèle économique où le besoin en fonds de roulement est négatif, et les charges de personnel très faibles.

Aujourd'hui, personne ne connait avec certitude la capitalisation boursière de la Française des Jeux pour son introduction. Mais les premières estimations à 20 euros l'action valoriseraient l'entreprise à environ 5 milliards d'euros, soit presque 30 fois les bénéfices nets annuels. Cette valorisation peut sembler élevée mais elle devra être analysée plus finement en la comparant aussi aux montants des dettes et des potentiels dividendes...

Côté croissance et long terme, si on regarde de plus près le chiffre d'affaires de la Française des Jeux : entre 2007 et 2017, nous sommes à environ 5 % de croissance annuelle. C'est une croissance solide et régulière qui peut rassurer l'investisseur. Mais la tendance est-elle durable avec la révolution numérique en cours sur les jeux d'argent et les paris en ligne ?

L'espérance de gains sur les jeux de grattage est toujours négatif...

La difficile transformation numérique

Pendant trop longtemps, la Française des Jeux n'a pas eu à se soucier de la concurrence pour des raisons de réglementation. Néanmoins, le manque de concurrence n'as pas que du bon car sur le long terme, cela rend les entreprises moins compétives, moins innovatrices et plus fainéantes...

Aujourd'hui, la Française des Jeux investit énormément pour réussir sa transformation numérique. Malheureusement, ce virage de l'informatique a déjà été pris par de très nombreuses entreprises qui proposent sur Internet toute sorte de jeux en ligne, jeux de hasard, casinos et autres paris sportifs. La nouvelle génération de joueurs délaisse de plus en plus les traditionnels jeux de grattage et Loto pour se laisser tenter par les jeux d'argent en ligne qui procurent bien plus de sensations (ou qui donnent le sentiment au joueur de mieux contrôler son destin...).

Avec la privatisation de la Française des Jeux, la gouvernance de l'entreprise va énormément évoluer. La concurrence étant de plus en plus rude (et venant aussi de l'étranger où la fiscalité est plus avantageuse et la réglementation plus souple), la FDJ va devoir faire prochainement des choix stratégiques qui peuvent s'avérer coûteux à terme. L'avenir est donc bien plus incertain pour cette vieille entreprise historique... Et l'Histoire montre que rares sont les entreprises traditionnelles à être les plus avant-gardistes dans les changements technologiques et de marché...

Vous n'avez qu'une chance sur plusieurs millions de gagner au Loto...

Ne jamais acheter à n'importe quel prix

Aussi géniale et aussi solide qu'une entreprise puisse être, gardez en tête qu'il ne faut jamais acheter à n'importe quel prix. Qui voudrait aujourd'hui acheter une action Hermès deux fois le prix du marché ? Et c'est souvent lors des phases d'introduction en bourse que les prix reflètent rarement la valeur intrasèque de l'entreprise. En effet, les informations financières ne sont pas toujours très complètes avec un long historique, il y a un biais lié à la médiatisation de l'introduction boursière, les actionnaires (ici en majorité l'Etat) qui souhaitent vendre leurs parts jouent souvent un rôle plus que discutables dans la communication financière...

Bref, soyez vigilants et n'achetez jamais à l'aveugle. La qualité d'une entreprise est une chose, mais tout a un prix !

Conclusion

Investir lors d'une introduction en bourse est toujours plus risqué. Certains diront que c'est là aussi où on peut espérer de grosses plus-values. Je ne partage pas totalement ce point de vue quand on regarde les récentes introductions boursières des cinq dernières années, c'est difficile de trouver une véritable pépite. Je vous conseille toujours de privilégier l'investissement passif !

Finalement, investir son argent dans la Française des Jeux pourrait bien ressembler à jouer son argent dans les jeux de grattage : cela sera encore l'Etat le grand gagnant ! Tiens, tiens, cela me rappelle un peu l'histoire d'Eurotunnel tout ça, où les investisseurs particuliers ont été rinçés alors que le modèle économique était très solide (il suffit de regarder le parcours boursier sur les 10 dernières années seulement)...

Je souhaite terminer ce billet sur une petite anecdote qui n'a rien à voir (quoique...) mais qui illustre très bien le biais psychologique des joueurs : saviez-vous que la combinaison 1-2-3-4-5 au Loto est très rarement cochée par les joueurs ? Pourtant, cette combinaison a tout autant de chances de sortir que les autres soi-disant aléatoires...